Carlo Rovelli par-delà le visible  Mon article 5: la fin de l'infini... ?

 

1) Préambule.

Comme je l'ai dit dans Dans mon article 1, j'ai interrompu mes articles à propos du  livre de Lee Smolin "La renaissance du temps" au chapitre 14 Je vais d'abord approfondir la question du temps avec la lecture du livre de Carlo Rovelli "par-delà le visible, la réalité du monde physique et la gravité quantique". Dans l'article 1), j'ai sauté directement à la troisième partie:  espace quantique et temps relationnel. Après les rappels historiques passionnants et des explications dont Carlo Rovelli a le secret concernant la relativité et la physique quantique, leurs limites et questionnements et qui ont abouti à ce que Lee Smolin décrit comme la crise de la physique avec son "rien ne va plus en physique", nous abordons ici les mystères de la gravitation quantique dont l'ambition est de dépasser ces problèmes et limites par une nouvelle théorie qui en réalisera peut-être l'unification. Dans l'article 2, nous avons vu que l'espace est un réseau de spins, dont les noeuds représentent les grains élémentaires, et les liens leurs relations de voisinage. L'espace-temps est créé à partir des processus où ces réseaux de spins se transforment les uns en les autres, et ces processus sont exprimés par des sommes de Mousses de spins, où une mousse représente un parcours idéal d'un réseau de spins, c'est à dire un espace-temps granulaire, où les sommets du réseau se combinent et se séparent. Ce pullulement microscopique de quanta à l'origine de l'espace et du temps obéit au calme apparent de la réalité macroscopique qui nous entoure. Chaque centimètre cube d'espace et chaque seconde de temps qui passe sont le résultat de cette mousse dansante de quanta minuscules.

 

Mes articles sur "ma lecture du livre de Carlo Rovelli "par-delà le visible:

Carlo Rovelli par-delà le visible mon article 1: Espace quantique et temps relationnel

 

Maintenant, dans cet article 5), poursuivons notre découverte des recherches de Carlo Rovelli  avec le chapitre 11 de son livre "par-delà le visible: la fin de l'infini.


2) La fin de l'infini.

 

https://www.post-sapiens.com/index.php/la-singularite-technologique/


En exergue: futura-sciences.com: Singularités et temps zéro : comment décrire l'univers ? - par Jean-pierre Luminet - « C'est nous — la divinité indivise qui opère en nous — qui avons rêvé l'univers. Nous l'avons rêvé solide, mystérieux, visible, omniprésent dans l'espace et fixe dans le temps ; mais nous avons permis qu'il y eût à jamais dans son architecture de minces interstices de déraison, pour attester sa fausseté. » Jorge Luis Borges, Les Avatars de la tortue 

futura science.com: qu'est-ce que l'infini?"Ce qui est directement connaissable est fini. L'idée d'infini surgit pourtant dès que nous pensons. Mais l'infini peut-il se rencontrer dans la nature, et dans la physique qui cherche à la représenter ? Est-il présent dans l'univers?"                                                           

L'infini constitue-t-il une dimension effective et multiple de la réalité ? Ou bien réside-t-il seulement dans notre esprit, fiction nécessaire à la pensée à quoi nulle réalité physique ne saurait correspondre ? Quelle importance a-t-il en mathématiques ? et en physique ?Jean-Pierre Luminet -

Au cours du précédent article (4), nous avons vu que concentration de la matière en un point infiniment dense tel que le prévoit la relativité générale au moment du big bang disparaît quand quand on tient compte de la gravité quantique. Celle-ci correspond à la découverte et la prise de conscience qu'il n'existe pas de points infiniment petits. "Dans le langage courant, un objet infiniment petit est un objet qui est plus petit que toute mesure possible, donc non pas d'une taille zéro, mais si petit qu'il ne peut être distingué de zéro par aucun moyen disponible. Par conséquent, lorsqu'il est utilisé en tant qu'adjectif, «infinitésimal» dans le langage vernaculaire signifie «extrêmement faible»

Ainsi, en gravité quantique et en particulier dans la gravitation quantique à boucles, il existe une limite inférieure à la divisibilité de l'espace: c'est l'échelle de Planck.

Si, comme en relativité générale on ignore la mécanique quantique, alors on ignore l'existence de cette limite inférieure. Dans ce cas, on arrive aux situations pathologiques que cette théorie prévoit, des quantités infinies appelées singularité. C'est ce qui se produit, comme nous l'avons vu au chapitre précédent au centre d'un trou noir. La singularité prévue par la relativité générale classique disparaît dès qu'on tien compte de la gravité quantique: "et si les trous noirs finissaient par exploser? Dans cet article de "lefigaro.fr", on peut lire: «Nos calculs montrent que l'effondrement de la matière dans le trou noir finit par s'arrêter, explique le physicien au Figaro. Lorsqu'on atteint une certaine densité, environ la masse du Soleil concentrée dans un seul atome, les effets quantiques de la gravité génèrent une force répulsive qui s'oppose à la contraction». Il en résulte un noyau extrêmement dense que le chercheur a baptisé «étoile de planck». Vue depuis l'extérieur du trou noir, cette phase dure plusieurs milliards d'années. Mais, au sein du trou noir, le temps (temps propre) s'écoule différemment en raison de la forte gravité qui y règne. Pour l'étoile, cette phase ne dure en réalité qu'une fraction de seconde. Très vite, la matière rebondit violemment dans une gigantesque explosion, transformant le trou noir en trou blanc, un grand flash lumineux. «La grande beauté de cette théorie est de concilier un scénario très dynamique (l'étoile originelle se contracte et explose presque instantanément dans son référentiel de temps) avec la perception que nous avons d'un phénomène extrêmement lent», s'enthousiasme Carlo Rovelli."

Examinons un autre cas de limitation de l'infini; il concerne aussi les forces comme l'électromagnétisme, l'une des quatre forces fondamentales de l'univers. C'est la théorie quantique des champs qui décrit cette 'force". Cette théorie, élaborée par Paul Dirac et complétée dans las années 1950 par le génial Professeur Richard Feyman et beaucoup d'autres, a changé notre vie en expliquant le monde et donnant les technologies qui bouleversent sans cesse notre vie. Mais cette théorie qui a abouti au modèle standard (physique des particules), est pleine d'absurdités mathématiques, ce que sont les infinis (L'infini est une notion mathématique qui n'a pas d'équivalent dans le monde physique. Soutenir que notre Univers serait « infini » est absurde car cela ne signifie rien en réalité (Christian Magnan). C'est ainsi que "quand ils mettent au point l'électrodynamique quantique (QED), Max BornWerner HeisenbergPascual Jordan, et Paul Dirac découvrent que beaucoup d'intégrales du calcul perturbatif divergent." Donc, quand on se sert de la mécanique quantique pour calculer des processus physiques, on obtient en général des résultats infinis, qui n'ont pas de signification. On les appelle des "divergences" qui sont éliminées par le résultat des calculs effectués à l'aide d'une procédure qui conduit à des résultats finis, la renormalisation. Et les chiffres , à la fin, sont justes. Wikipedia explique: "La renormalisation détermine la façon de relier les paramètres de la théorie quand ces paramètres à grande échelle diffèrent de leur valeur à petite échelle. La renormalisation a été initialement développée en électrodynamique quantique (QED), en vue d'interpréter des intégrales divergentes de la théorie des perturbations. Au début, elle est considérée comme une procédure suspecte et provisoire par certains de ses auteurs. Finalement la renormalisation a été incorporée comme un outil important et logiquement cohérent dans plusieurs domaines de physique et de mathématiquesL'idée majeure de la renormalisation est de corriger le lagrangien original d'une théorie quantique des champs par une série infinie de contre-termes, correspondant aux graphes de Feynman qui codent le développement perturbatif de la théorie."  Dirac, vers la fin de sa vie, se sentait insatisfait à cause de ces infinis qui jalonnaient la théorie contrariaient son souci de clarté dans son objectif de comprendre comment fonctionnent vraiment les choses:  Il a dit "ce qui suit à propos de la renormalisation dans la théorie des champs quantique dans La recherche d'une théorie quantique des champs": "La renormalisation est] une simple procédure à suivre. Il doit y avoir un changement fondamental dans nos idées, probablement tout autant que le passage de la théorie de l'orbite de Bohr à la mécanique quantique. Lorsque vous obtenez un nombre qui s'avère infini, devrait être fini, vous devriez admettre qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans vos équations et ne pas espérer que vous pourrez obtenir une bonne théorie simplement en corrigeant ce nombre". 

Mais d'où sortent ces infinis. Si on se réfère a nouveau à Wikipedia, y lit que "[..] quand on décrit l'espace et le temps comme un continuum, certaines constructions statistiques et quantiques deviennent indéfinies. Pour les définir, il faut prendre des précautions pour passer à la limite". C"est ce qui fait dire à Carlo Rovelli que "les infinis de la théorie quantique des champs découlent tous d'une hypothèse à la base de cette théorie: l'infinie divisibilité de l'espace. 

Mais quand on tient compte de la gravité quantique, les infinis disparaissent car l'espace n'est pas infiniment divisible. Il n'a pas de points qui aient une dimension égale à zéro, avec donc une infinité de points et en conséquence une infinité de choses à additionner. L'espace a une structure granulaire et discrète, ce qui permet d'éliminer les infinis qui affligent la théorie quantique des champs. C'est un résultat magnifique. D'un côté, en tenant compte de de la mécanique quantique, on résout les problèmes créés par les infinis de la relativité générale d'Einstein, c'est à dire les singularités comme les trous noirs, et de l'autre, en tenant compte de la gravité, on résout les problèmes de la théorie quantique des champs, c'est à dire les divergences. La gravitation quantique à boucles est donc une théorie dont la crédibilité se trouve renforcée, puisqu'elle semble être une solution à l'apparente contradiction entre la mécanique quantique et le relativité générale. Chacune des théories y devient la solution aux problèmes de l'autre. 

La physique moderne cherche fréquemment de façon récurrente à poser une limite à l'infini. C'est ce que rappelle l'exergue à ce chapitre: "Ce qui est directement connaissable est fini. L'idée d'infini surgit pourtant dès que nous pensons. Mais l'infini peut-il se rencontrer dans la nature, et dans la physique qui cherche à la représenter ? En relativité restreintela limite est la vitesse de la lumière, la vitesse maximale pour tous les systèmes physiques, et qui est un invariant relativiste. En mécanique quantique, on découvre que qu'il existe une limite, l'information maximale dans tout système physique. Les dimensions de Planck sont les grandeurs les plus petites concevables de l'Univers.Voir le tableau suivant en résumé de tout ceci; issu de wikipedia 

Les unités de Planck sont alors ainsi définies :

Nom

Dimension

Formule

Valeur approchée (en unités du SI)

Longueur de Planck

longueur (L)

{\displaystyle l_{\mathrm {P} }={\sqrt {\frac {G\hbar }{c^{3}}}}}

1,616 × 10−35 m

Masse de Planck

masse (M)

{\displaystyle m_{\mathrm {P} }={\sqrt {\frac {c\hbar }{G}}}}

2,177 × 10−8 kg

Temps de Planck

temps (T)

{\displaystyle t_{\mathrm {P} }={\frac {l_{\mathrm {P} }}{c}}={\sqrt {\frac {\hbar G}{c^{5}}}}}

5,391 × 10−44 s

Température de Planck

température (Θ)

{\displaystyle T_{\mathrm {P} }={\frac {m_{\mathrm {P} }c^{2}}{k_{B}}}={\frac {\sqrt {c^{5}{\frac {\hbar }{G}}}}{k_{B}}}}

1,416 833 139 × 1032 K

Charge de Planck

charge électrique (Q)

{\displaystyle q_{\mathrm {P} }={\sqrt {c\hbar 4\pi \varepsilon _{0}}}}

1,875 × 10−18 C

Les limites sont donc selon la théorie:

     Relativité, la Vitesse: il existe une vitesse maximale c

     Mécanique quantique l' Information: il existe une information minimale (action) h

     Gravité, la Longueur: Il existe une longueur quantique minimale L(théories de la gravité quantique). 

L'existence de ces valeurs limite détermine (cf wikipedia) "un système d'unités de mesures naturelles basé uniquement sur ces constantes physiques universelles, ce qui implique que la valeur numérique des constantes physiques sélectionnées, exprimées dans ces unités, vaut exactement 1. Ces constantes sont par conséquent omises des expressions mathématiques des lois physiques. mais si cela semble simplifier les choses, cela entraîne une perte de clarté due à la perte d'information nécessaire à l'analyse dimensionnelle. Il y a apparition de grandeurs sans dimension". Par exemple, v=1/2 signifie que le corps se déplace à une vitesse de moitié inférieure à celle de de la lumière. Lp =1 signifie que les longueurs sont mesurées en multiples de la longueur de Planck. h=1 signifie que les actions sont mesurées en multiples de la constante de Planck. Dans ce système, l'unité de temps sera le temps que met la lumière pour "parcourir" ou couvrir la longueur de Planck. 

Retour sur la signification des infinis.

     1) Il découle de ces découvertes que la détermination des trois constantes fondamentales pose une limite à ce que semblaient être jusque là les infinis possibles dans la nature. Ce qui apparaît comme infini n'est souvent rien d'autre que ce que nous n'avons pas encore compris ou mesuré et la nature semble dire qu'il n'y a rien de vraiment infini. 

     2) Un autre infini hante les pensées des hommes depuis toujours, l'infini de l'étendu du cosmos. L'univers est-il fini ou infini? La question est loin d'être résolue. Einstein a imaginé un cosmos dans bords, mais fini: dans wikipedia,"L'Univers d'Einstein est fondé sur le principe cosmologique proposé par Einstein pour l'occasion, à savoir l'idée que l'univers est homogène et isotrope. Pour des raisons qui semblent d'ordre philosophique, Einstein lui a adjoint l'hypothèse que celui-ci était statique, immuable. Sous l'effet de la gravité, les différents objets de l'univers s'attirent les uns les autres et ont donc tendance à se rapprocher. Pour contrebalancer cette attraction, Einstein a été amené à introduire l'équivalent d'une force répulsive dans l'univers, qu'il a appelé constante cosmologique. Cette hypothèse, qui rétrospectivement apparaît extrêmement ad hoc au vu du contexte, permet d'établir un équilibre entre phénomènes attractifs et répulsifs. Pour que cet équilibre puisse exister, il est nécessaire que la courbure spatiale de l'univers soit positive, autrement dit que l'univers soit d'extension finie, mais sans bord, un peu comme la surface bidimensionnelle d'une sphère. La staticité de l'univers est alors assurée si une certaine relation entre constante cosmologique, densité de matière et courbure spatiale est satisfaite"Mais La découverte de l'expansion de l'Univers par Edwin Hubble à la fin des années 1920 a invalidé ce modèle.
Les mesures actuelles donnent une échelle d'environ 13,8 milliards d'années-lumière pour l'Univers observable
Par définition, l'Univers visible est une boule dont la limite est située à l'horizon cosmologique, et dont la Terre constitue le centre. C'est donc une notion relative, et d'autres observateurs situés ailleurs dans l'Univers n'auront pas la même boule observable (mais son rayon restera le même). Voir villemin.gerard.free.fr pour plus de précisions. Cette taille est plus grande que la longueur de Planck dans un rapport de 1 à in chiffre d'environ 1 suivi de 120 zéros. Entre l'échelle de Planck et l'échelle cosmologique, il y a donc cette énorme distance de 120 ordres de grandeur. C'est énorme, mais fini.

     3) De nos jours, une nouvelle vision de l'infini de l'univers émerge. En effet, que dire de la taille de l'Univers?: "Les cosmologistes n'en n'ont, en fait, pas la moindre idée. [...] Les chercheurs ont donc une idée plus ou moins claire de la taille de cet univers observable, mais ces calculs ne renseignent en rien sur les proportions de l’ensemble ni sur l’existence d’une éventuelle frontière. La taille de l’Univers dans son ensemble va donc bien au-delà, mais il n’existe à ce jour aucun moyen de le savoir". Ainsi les chercheurs parmi lesquels stephen Hawking envisagent des univers multiples.L'idée des univers multiples émerge d'une théorie suggérant qu'à sa création, lors du Big Bang, le cosmos a subi une expansion fulgurante. Pendant cette période, toutes les régions de l'espace n'auraient pas évolué à la même vitesse, certaines s'arrêtant de s'étendre avant les autres, créant différents univers-bulles. Notre univers étant une de ces bulles. L'idée d'univers multiples ou "multivers" n'est pas nouvelle. Elle a traversé toute l’histoire de la philosophie mais "elle fait depuis peu effraction dans le champ de la physique théorique", explique à l'AFP Aurélien Barrau". Ce dernier apporte des précisions dans son ouvrage Des univers multiples. Cela a fait l'objet de deux de mes articles actuellement rédigés, Univers multiples Chap 1) et Univers multiples. La gravitation quantique (chp. 9).

Suite de l'article voir sur mon autre blog: https://monblogdereflexions.blogspot.com/2018/11/carlo-rovelli-par-dela-le-visible-mon.html#.XEI7KlxKj4Y

 

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